J'écris "aux bons dieux"...

Faute de côtoyer des saints, j’écris aux « bons dieux »…

 

En mai 2012, nous avons eu des élections dans ce pays. J’ai entendu parler d’un nouveau ministère : celui du « redressement productif »… Tout un programme !

Je retrouve mon sens de l’humour et prends donc la plume pour écrire à Monsieur Montebourg (je sais, ça rime !) et lui exposer ma situation et lui évoquer d’autres types de redressement pas très positifs ceux là.

Cet homme doit avoir un super secrétariat, car je reçois un courrier daté du lendemain de mon envoi (par courrier suivi) me disant (je cite) « qu’il était sensible aux faits évoqués et qu’il transmettait « a qui de droit » mon courrier.

Une lueur d’espoir !??

Dans la foulée, je propage ma relation épistolaire jusqu’à notre président de la république, toujours en exposant les faits de manière circonstanciée.

Quelques mois plus tard, je recevrai une missive d’un chef de cabinet de la présidence de la république qui me précise en ces termes :

« Cher monsieur, 

Le président de la république a bien reçu le courrier que vous avez souhaité lui faire parvenir et m’a confié le soin de vous répondre.

Monsieur François Hollande est bien conscient des contraintes auxquelles certains chefs d’entreprise peuvent être confrontés dans le cadre de leurs démarches administratives. Il est déterminé à tout mettre en œuvre pour apporter des réponses concrètes à leurs difficultés.

Ainsi, la Banque publique d’investissement (BPI), voulue par le président de la république, doit apporter à l’aide d’un guichet unique, une réponse simple aux besoins de financement des entreprises.

Aussi, soyez assuré de toute l’attention portée à votre témoignage et vos réflexions.

Je vous prie d’agréer, Cher Monsieur, l’expression de mes sentiments les meilleurs. »


Si je ne m’abuse, la BPI ne concerne que des entreprises faisant plus de 700 k euros de chiffre d’affaire par an…

Que les artisans qui en font autant se dénoncent (ou demandent des sous) !!!

Motivé par cette réponse, je m’enquiers alors de ce qu’est devenu mon précédent courrier à Monsieur le ministre du redressement productif.

Au téléphone, j’ai une charmante dame qui m’aiguille sur une autre charmante dame qui recherche trace de mon courrier… Et qui (Oh miracle) tombe dessus !

Mon courrier a donc été transmis, il y a de cela plusieurs mois, au cabinet de Monsieur Michel Sapin, « Ministre du Travail, de l'Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social » …

Je contacte donc le cabinet du ministre…

Après une petite balade de service en service, je tombe (encore) sur une charmante dame qui recherche trace de mon courrier… En vain cette fois !

Qu’à cela ne tienne, je me permets d’abuser de son temps et lui explique mon cas. Nous resterons près d’une heure au téléphone…

J’ai au bout du fil, une personne très à l’écoute et très compatissante, au fur et à mesure de mes explications, elle va d’étonnement en étonnement pour finalement me dire que cette situation est absolument absurde et qu’il faut que je me batte.

Toutefois, « l’affaire » étant entre les mains de la justice, elle me déclare que le ministère n’y peut plus rien et qu’il faut « laisser passer la justice ».

Elle me réconforte mais me recommande de me préparer, moi et mon épouse, à « un après ».

Un après… Voilà le mot lâché ! Après tout cela : plus de boulot (vingt ans de carrière ruinés en quelques mois), plus de voiture, plus de maison bientôt… Un après… Un après quoi au fait !??

Nous échangeons nos numéros et elle me demande de lui communiquer copie du courrier au ministre ainsi que mes numéros d’immatriculation Siren etc…

Pour gagner du temps, je lui propose de lui envoyer un relevé de situation INSEE disponible sur le net.

 

Premières révélations…

Je m’empresse donc, à peine le téléphone raccroché de me connecter sur le site de l’INSEE pour éditer mon relevé de situation.

Nous sommes début février 2013.

Surprise sur le site de l’INSEE : mon entreprise est déclarée fermée depuis le 27 Janvier 2012.

Je téléphone immédiatement à L’INSEE (eh oui, il y a moyen de les joindre au téléphone) !

La personne contactée à l’INSEE me déclare que mon entreprise a été déclarée fermée suite à liquidation judiciaire le 27 janvier 2012 (soit le jour de l’audience « fantôme » où je n’étais pas convoqué).

Je rétorque qu’il ne s’agit que d’un redressement judiciaire assorti d’une période d’observation et donc, en aucun cas, d’une fermeture.

Il m’est répondu que c’est un bureau de Nantes qui gère cela et qui est alimenté directement par les CFE (donc dans mon cas : celui de l’URSSAF).

Je me souviens à cet instant de la remarque d’un comptable d’une grande surface auprès de qui je m’étonnais l’année dernière de ne pas voir mon contrat renouvelé et qui me disais à l’époque : « Il n’y a rien à redire sur ce que tu fais ici, je crois que c’est plus administratif qu’autre chose. ».

Il faut savoir que dans la grande distribution, les fournisseurs sont régulièrement audités et que le relevé de situation INSEE fait partie des pièces les plus immédiatement consultées par les centrales qui s’informent de la situation des entreprises qu’ils emploient.

Force est de constater qu’une entreprise fermée n’engage pas à renouveler un quelconque contrat avec elle !

Je fis part de ce fait à mon correspondant à l’INSEE en protestant vigoureusement face à cette « erreur ». Il me confirmait que tout cela venait du bureau de Nantes et donc de mon CFE qui l’avait averti et qu’ainsi, il n’avait aucune marge de manœuvre sur ce fait.

Je rappelle mon contact au ministère et lui fait part de la situation. Nouvel étonnement de sa part.

Une dizaine de jours plus tard, alors que j’évoquais ce relevé de l’INSEE avec un correspondant juriste, il se connecta pendant notre conversation et m’annonça que mon relevé INSEE indiquait que j’étais encore en activité. Nouvelle surprise !

Je vérifiais immédiatement et rappelais l’INSEE. La personne au bout du fil me dit qu’effectivement, mon relevé de situation était passé du statut « entreprise fermée depuis le 27 Janvier 2012 » à « entreprise en activité ».

Ce changement avait eu lieu le 11 février 2013 soit quelques jours après mon premier appel à l’INSEE. Je demandais des précisions quant aux motifs de ce changement. La réponse fut évasive : « Je ne sais pas je n’ai pas de trace, c’est juste changé c’est tout… ».

Aucun CFE n’était donc intervenu pour motiver ce changement !

Après tout, la perte de mes clients grande distribution et la fermeture de mes comptes fournisseurs provenaient en bonne partie de l’état de ce relevé de situation.

Alors que pour l’INSEE, une entreprise placée en redressement judiciaire et donc en période d’observation, ne fait l’objet d’aucune mention particulière. Cette mention de fermeture sur mon relevé de situation constituait donc là un réel préjudice à mon encontre.

Je demandais alors à mon correspondant de bien vouloir me communiquer par écrit ce qu’il venait de me dire.

Mais je me heurtais à un refus, les agents de l’INSEE ayant pour consigne stricte de ne rien communiquer par écrit avec les usagers.

Je saisissais alors la CNIL qui reçu et accepta ma plainte le 2 septembre 2013 et à ce jour j’attends communication des pièces demandées.

 

Bavures, manipulations ou système pervers et mal conçu ?..

Comme tout un chacun l’aurait fait, je me suis renseigné sur ce genre de procédure et, parcourant le net, j’ai découvert qu’il s’agissait là de quelque chose de courant. Très courant même lorsque cela provient du RSI et de l’URSSAF.

Les témoignages provenant de dirigeants de TPE concernant les abus ou les aberrations des URSSAF ou du RSI sont légions et certains sont terribles.

Tous témoignent de vies brisées, voire perdues, d’emploi saccagés et d’une justice sourde et opaque.

A la fois parties et juges, ces organismes peuvent sur leur simple avis ou désir charger qui un huissier ou un tribunal d’exécuter leurs décision. En droit, cela s’appelle un « titre exécutoire ».

En France, un titre exécutoire est un acte qui constate une créance liquide et exigible, « susceptible de justifier l'utilisation d'une voie d'exécution ».

Les différents titres exécutoires sont énumérés par l'article L.111-3 du Code des procédures civiles d'exécution :

« Seuls constituent des titres exécutoires :  

1° Les décisions des juridictions de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif lorsqu'elles ont force exécutoire, ainsi que les accords auxquels ces juridictions ont conféré force exécutoire ;

2° Les actes et les jugements étrangers ainsi que les sentences arbitrales déclarés exécutoires par une décision non susceptible d'un recours suspensif d'exécution ;

3° Les extraits de procès-verbaux de conciliation signés par le juge et les parties ;

4° Les actes notariés revêtus de la formule exécutoire ;

5° Le titre délivré par l'huissier de justice en cas de non-paiement d'un chèque ;

6° Les titres délivrés par les personnes morales de droit public qualifiés comme tels par la loi, ou les décisions auxquelles la loi attache les effets d'un jugement. »

On se souvient que mon CFE : c’est l’URSSAF… Cet organisme entre dans la sixième catégorie de la liste ci dessus.

On sait que c’est à la demande de l’URSSAF que toute cette procédure a été déclenchée.  L’URSSAF a donc émis un titre exécutoire à mon encontre pour une somme globale de 53 000 euros et demandé au tribunal de placer mon entreprise en redressement judiciaire sans jamais se justifier de cette somme.

En clair, outre les légèretés consistant à ne pas me convoquer à une audience, la « présomption d’innocence » était tout à fait absente de… l’absence de débat !

A ce stade, il m’arrive de m’interroger sur ce qui se passe réellement. Tout cela semble tellement surréaliste, on se croirait dans un film allemand des années 1930 : C’est incompréhensible et résolument  glauque. Voilà plus d’un an que l’on ma empêché de travailler, ruiné 20 ans de carrière, entaché ma réputation auprès de mes clients et de mes fournisseurs…

Voilà plus d’un an que je n’ai plus aucun revenu. On me « trimballe » de mois en mois au fil d’audiences qui tournent inéluctablement vers « nous attendons des précisions de l’URSSAF, nous reportons donc à … ».

Mon avocat demeure totalement inerte et l’URSSAF muette.